vendredi 25 décembre 2015

Noël

Dans un livre récent, une sorte de réponse à l'Étranger de Camus, intitulée Meursault, contre-enquête, l'auteur, Kamel Daoud, reprend le premier ouvrage en adoptant l'autre point de vue, celui de la victime, ou plutôt de son jeune frère.
On y découvre son deuil, sa colère, son impuissance, mêlés aux interrogations diverses qui accompagnent l'évolution de l'Algérie après son indépendance.
Parmi ces questions se pose bien sûr celle de la religion, que le narrateur rejette fermement :

(...) parmi tous ceux qui bavardent sur ma condition - cohortes d'anges, de dieux, de diables ou de livres -, j'ai su, très jeune, que j'étais le seul à connaître la douleur, l'obligation de la mort, du travail et de la maladie.(...) Donc, ouste ! Du coup, je déteste les religions et la soumission. A-t-on idée de courir après un père qui n'a jamais posé son pied sur cette terre et qui n'a jamais eu à connaître la faim ou l'effort pour gagner sa vie ?
C'est dit avec efficacité.
Mais justement, pour rencontrer Celui qui a voulu être aussi proche de nous qu'on peut le souhaiter, Celui qui a su réaliser cette communion intime dans l'effort et la souffrance jusque dans la mort, c'est aujourd'hui...


mardi 22 décembre 2015

Mon Universalis

Ce n'est pas vraiment un cadeau de Noël.
C'est la concrétisation inattendue d'un vieux rêve.
C'était une somme de savoirs qui déplaçait à la Bibliothèque Universitaire les étudiants pressés de consulter les précieux articles consacrés à leur domaine de travail du moment. On lisait l'article sur Proust, sur Platon, sur le Romantisme... On prenait des notes, on hésitait à photocopier le tout, on prévoyait de revenir pour lire tel et tel article indispensable...
Les précieux volumes occupaient un espace privilégié parmi les ouvrages de référence. L'Encyclopoedia Universalis, trésor hors de portée pour la bourse d'un étudiant, caution de sérieux et source d'informations dont on espérait beaucoup (en particulier pour améliorer les dissertations), trônait dans l'imagination au travail comme une Bible.
Puis les temps ont changé. Les études finies, on a renoncé à acquérir les précieux volumes en supposant que l'on aurait toujours accès (!) à une bibliothèque publique pour y revenir, et en se disant que l'usage domestique en serait peu fréquent. Un bon Grand Larousse Universel devait être plus accessible à une famille en pleine croissance.
Puis la révolution Internet a eu lieu. Jeunes gens et jeunes filles, lorsqu'une question épineuse les arrête, ne songent plus à sortir des rayons quelque pesant volume pour y promener un doigt et un regard interrogateur jusqu'à la bonne colonne de la bonne page. Désormais, c'est sur un clavier et un écran que doigts et regard se promènent.
Pour le meilleur sans doute, la somme de savoirs est maintenant accessible en ligne, dans toutes les langues, actualisés constamment par des spécialistes du monde entier...
Et qui sait ce qu'il va advenir des précieux volumes, dans les bibliothèques de France ?
En tout cas, à la bibliothèque du lycée français de Washington (où Myosotis a repris du service), l'Universalis tout entière, reléguée au rang de cale ou de support pour les expositions temporaires, était promise à la poubelle.
Mais cela ne pouvait être. Cela ne sera pas.
Grâce à la gentille compréhension de la documentaliste et avec l'accord amusé du Grand Chêne, les précieux volumes sont désormais installés dans le sous-sol de la maison, on leur a fait une place de choix parmi les Lego et le reste. C'est la plus belle opération de recyclage qui se puisse imaginer. Un happy ending, en quelque sorte. Ou peut-être un happy beginning ?