Jacqueline de Romilly vient de mourir. La grande dame des Lettres Classiques avait 97 ans, elle était très malade et presque aveugle. C'est elle-même qui donne le mot de la fin pour conclure sa biographie :
La liste impressionnante de ses oeuvres (depuis sa thèse sur Thucydide), les fonctions qu'elle a occupées et les distinctions qu'elle a reçues en attestent.« Avoir été juive sous l'Occupation, finir seule, presque aveugle, sans enfants et sans famille, est-ce vraiment sensationnel ? Mais ma vie de professeur a été, d'un bout à l'autre, celle que je souhaitais. »
Elle s'amusait à se présenter en affirmant que son époque était le IVe siècle avant Jésus-Christ et en convenant avec coquetterie qu'elle ne faisait pas son âge... Émerveillée par le miracle grec, elle croyait fermement que la culture classique pouvait aider les gens de notre époque à vivre mieux. Avec son talent, sa passion, son esprit, elle ennuyait ceux qui prétendaient faire des économies en diminuant le budget consacré à l'enseignement du Latin et du Grec. Elle ne les ennuiera plus.
C'est bien dommage parce que le Grec, c'est joli

C'est aussi plein d'histoires qui nous touchent au plus profond de l'âme : l'Odyssée d'Ulysse qui veut rentrer chez lui après 20ans d'absence, le triste sort d'Andromaque en deuil de Troie, la douleur d'Œdipe écrasé par son destin...
Et c'est encore riche de grands exemples de sagesse qui n'ont pas fini de nous éclairer, Socrate, Aristote et tous les autres...
Depuis son paradis, elle ne laissera sûrement pas tomber sa lutte pour les jolis mots et les grandes idées qui la rendaient si heureuse. Pour que vive encore et toujours la beauté à laquelle elle avait voué son existence
