mercredi 19 décembre 2018

Le Dit de la Dame de Faverolles

(D'après un authentique manuscrit françois retrouvé au fond d'une malle, dans le Nouveau Monde)


Voici l’histoire incroyable mais édifiante de la Damoiselle de Cancale, qui un beau matin quitta l’air marin pour la douceur angevine.
 La Damoiselle de Cancale avait vu le jour près de la mer Manche et s’y trouvait si bien qu’elle ne la pouvait quitter de plus de quelques lieues sans se languir. Elle avait estudié dans maints livres art et histoire, elle savait graver la pierre et elle avait couru le monde mais sans trouver le repos du coeur. Elle estudia encore et se lia avec une Damoiselle au grand cœur mais sans repos, qui après bien des aventures la mena travailler aux vendanges pour se distraire. L’amie se doutait un peu que le Maître Vigneron pourrait plaire à la Damoiselle de Cancale, mais comment eût-elle deviné les suites de cette histoire ?
La Damoiselle et le Maître Vigneron se plurent et complurent si fort qu’ils n’eurent pas besoin de longtemps pour résoudre de vivre ensemble. Le travail des vignes et les solides amitiés tissées au fil des ans n’avaient point comblé le cœur du Maître Vigneron, pas plus que la Damoiselle n’avait trouvé plénitude au long des jours de sa prime jeunesse. Installés tous deux enfin dans le village du doux Berry où le Maître soigne ses vignes, voilà qu’il leur naquit un rejeton sans pareil et le désir de fonder un foyer. Les noces furent donc fixées au solstice de l’été suivant.
Las ! Que n’avaient-ils appelé pour parfaire leur demeure ouvriers et paysans du voisinage, valeureux et bons artisans qui eussent pu leur venir en aide ! La Damoiselle intrépide, pour en dégager la pente, voulut monter sur un toit si traître que le pied lui manqua et qu’elle chut à s’en rompre le col… Éternelles grâces soient rendues à Dieu par l’entremise de son serviteur Saint Joseph de Copertino de ce qu’elle fut seulement blessée mais n’y perdit point la vie !
Secourue et pansée par les plus grands médecins, elle passa de rudes semaines à patienter sur sa couche de douleur, tandis que de charitables gens s’empressaient pour prendre soin d’elle, ainsi que du rejeton sans pareil. Le Maître Vigneron trouva la force de mener à bien son labeur en prenant sa part des soins de la belle et du rejeton, fruit de leurs amours. Enfin la Damoiselle put se relever et se parer pour les noces.
Comme ils étaient beaux tous deux, le Maître Vigneron coiffé de ses plus beaux chapeaux et la Damoiselle délicatement fardée, coiffée et enveloppée de sa robe de rêve ! C’est ainsi qu’elle devint Dame de Faverolles, pour la plus grande joie de sa famille et de leurs amis. Le Maître Vigneron travailla de plus belle et se promit de bâtir pour sa Dame un château où grandirait leur descendance.
Désormais flanquée de leur rejeton sans pareil, occupée aux soins du ménage et souvent au service des vignes et du vin, elle n’en conserva pas moins le goût de l’aventure. Alors sans plus se risquer sur des terrains peu sûrs, elle se lança dans le commerce d’épices et de denrées dont sont friands les bonnes gens de Faverolles, privés depuis longtemps de leur négociant particulier. Ainsi peut-on festoyer dans ce joli village désormais plus accueillant que jamais, et dans ses alentours !
Que le bon vin abonde, que les épices et gourmandises de tout le pays (et même les fruits de mer de son rivage natal) affluent pour le bonheur de chacun, et que la prospérité de la Dame de Faverolles et de son Maître Vigneron soit redite de génération en génération !

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Le moteur de recherche capable de dénicher la trace de l’œuvre originale n’est pas encore programmé. Qu’importe, le Nouveau Monde révèle un bien beau récit. Qu’on se le lise !
LT,

jardinette a dit…

qu'en termes galants ces choses là sont dites !
un récit gai et captivant pour qui connait l'histoire !
l'art de l'écriture allié aux sentiments donne un beau résultat !bravo !